Les Assises territoriales de la Transition Agro-écologique et de l’Alimentation durable (ATAE) se sont tenues les 2 et 3 décembre à Montpellier. Ce sont plus de 70 ateliers qui ont rassemblé 800 participants professionnels sur ces 2 jours. Nous y étions pour parler de l’exemple de Dijon, voici notre retour !
Si nous étions présents pour animer l’atelier « La transition alimentaire, levier du développement économique, l’exemple de Dijon » ; notre participation à d’autres ateliers nous poussent à souligner les 2 grandes questions qui ressortent de ces Assises :
- Celle des démarches multiples des territoires en faveur des transitions, avec des enjeux spécifiques, et des enjeux que l’on retrouve chez tous.
- Celle de la reconnexion entre la production et la consommation, comme levier d’action.
Étape initiale : le diagnostic
Aujourd’hui centrée autour de ProDij, la politique de transition d’agro-alimentation de Dijon vit depuis plus de 15 ans avec des actions phares comme la construction du Technopole Agro-Environnement à Bretenière (le site d’AgrOnov) ; la création d’une agence économique, Dijon Bourgogne Invest. Néanmoins, la phase de diagnostic plus précis a été initiée depuis 2018.
Sur le constat d’être au centre d’une grande région agricole (la 3ème de France) mais plutôt pauvre en industries de transformation, la Métropole de Dijon a initié sa démarche avec l’appui méthodologique du bureau d’étude Soliance Alimentaire, pour avoir une image plus précise et un diagnostic sur la question de la souveraineté et de l’autonomie alimentaire.
Cette première étape de diagnostic est largement partagée dans l’ensemble des démarches en France, comme dans le projet FOPA en Occitanie par exemple, mais également dans les méthodes sur lesquelles l’ADEME et Solagro travaillent avec des indicateurs phares que sont :
- le potentiel nourricier : est-ce que ma surface agricole est suffisante pour nourrir la population ?
- le potentiel agro industriel : capacité industrielle et emplois pour transformer cette production ?
Il existe également des outils en ligne. On retient la plateforme CRATer, développée par Les Greniers d’Abondance, en lien avec de nombreux partenaires. Son objectif est d’abord de vulgariser les transitions alimentaires, d’en parler simplement. En 3 minutes, vous obtenez une réponse sur votre territoire sur les questions d’agriculteurs, de l’eau, la biodiversité, etc. et des pistes et leviers mis en place par des territoires similaires au vôtre.
Avec des ateliers participatifs nécessaires…
Les travaux de Dijon Métropole ont fortement investi les acteurs locaux, dans l’étude, autant que la présentation des résultats. A l’échelle des consommateurs, Vitagora anime un livinglab pour impliquer les citoyens dans la transition est entièrement cohérente avec l’ensemble de la démarche et permet de tenir compte des comportements alimentaires spécifiques du territoire, car ils dépendent aussi de l’offre.
Les autres territoires témoignent tous de l’importance du caractère participatif dans les démarches de transition, plutôt que de prêcher une solution devant une autre. C’est un point essentiel dans les démarches.
Toutefois, l’ADEME souligne l’effet pervers de ces ateliers avec les acteurs de terrain. En effet, s’ils ne sont pas présents, les travaux ne peuvent pas être investis et certaines filières ne sont pas intégrées dans les démarches. D’où l’importance de sensibiliser sur les enjeux !
Par ailleurs, même avec une participation des acteurs dans les ateliers, comment les investir concrètement dans l’action ?
… pour aller jusqu’à l’action et reconnecter production et consommation !
Il n’est pas toujours facile d’aller jusqu’à l’action et un portage concret des projets par les acteurs économiques.
Pour ceux qui le font, on voit tout l’intérêt d’un pôle comme AgrOnov, qui accompagne ces acteurs (coopératives, distributeurs) dans leurs projets en créant du lien avec les solutions innovantes permettant d’apporter les briques technologiques et les compétences manquantes pour réussir le projet. À l’inverse, quand les innovations en faveur des transitions viennent des entreprises, AgrOnov facilite le transfert de ces solutions, leur expérimentation, leur validation terrain en impliquant les acteurs du développement agricole.
La question reste entière sur le rôle d’un territoire pour favoriser le portage de projet répondant au besoin de souveraineté alimentaire…
Les actions de territoires
La sensibilisation reste une étape primordiale pour entrer dans l’action de manière consciente. Cela passe par la narration des scénarii de prospective, soulignée par Solagro, mais aussi les outils de fresque ou jeu de rôles, comme ceux développés par HYDROS sur la gestion de l’eau.
Le projet OTAEE cherche aussi à apporter des réponses. Il s’agit d’illustrer des démarches pas à pas, dans toute leur complexité, en intégrant les paysages, les territoires, les filières, les déchets, l’énergie, etc.
Ces assises ont aussi traité de la place des crédits carbone dans les territoires. La Métropole Européenne de Lille a lancé un projet pour disposer des données objectives sur le potentiel de séquestration carbone et pour quels changements de pratiques. Il permet aussi de tester la place d’un territoire dans un jeu d’acteurs complexes et la pertinence des crédits carbone pour financer les transitions.
La ressource en eau a évidemment été abordée sur ces 2 jours. L’exemple du travail de la Métropole du Grand Paris avec la Chambre d’Agriculture de Côte d’Or est parlant ! Pour réduire le risque d’inondation sur Paris, l’enjeu est de stocker de l’eau le plus en aval possible en préservant les zones d’extension de crues, en restaurant celles qui ne sont plus fonctionnelles, ou en créant des zones d’inondations des parcelles chez les agriculteurs qui sont compensés pour ce risque. Sur la première année, une enveloppe de 1M€ a été bloquée par la Métropole du Grand Paris pour les paiements pour services rendus aux agriculteurs. La Chambre d’Agriculture Côte d’Or anime aujourd’hui ce projet pour investir les agriculteurs !
Pour les agriculteurs, les enjeux sont évidemment sur le financement des transitions, et l’apport de connaissances et solutions concrètes déjà utilisables.
Encore une fois, les exemples cités plus haut illustrent bien comment les acteurs répondent à ces enjeux : crédit carbone, PSE, animation de filière, animation des projets, définition et l’accompagnement de cultures BNI (Bas Niveaux d’Intrants).
L’apport de connaissance est illustré par exemple avec OSEA. Il s’agit d’une plateforme qui recense les pratiques agroécologiques qui existent déjà avec des témoignages d’agriculteurs. Ces témoignages sont techniques mais vulgarisés et surtout assortis d’un dossier technique qui valide la pratique en question. Encore une fois, le rôle d’AgrOnov de créer du lien entre entreprises innovantes et acteurs du monde agricole pour en accélérer le transfert sur le terrain.
Conclusion : Financement, souveraineté, et travail par filière
Les témoignages ont montré que l’échelle des filières est nécessaire pour construire la transition alimentaire d’un territoire mais aussi que le financement des agriculteurs est primordial pour les investir dans le changement de pratique. Les territoires ont tous insisté sur des objectifs de souveraineté et non d’autonomie. Cette dernière n’aurait pas de sens avec les potentiels et les conditions de production de certains produits. Il est aussi important de prioriser.
Rendez-vous dans 2 ans, à Dijon cette fois, pour les prochaines Assises de la Transition Agro-écologique.