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Sol et systèmes alimentaires : les enseignements des JES 2023

Les 16èmes Journées d’Étude des Sols (JES) se sont déroulées du 26 au 29 juin 2023 à Dijon. Organisées par l’Institut Agro Dijon et l’AFES (Association Française pour l’Étude des Sols), l’événement a rassemblé chercheurs, bureaux d’études, EPCI et conseillers autour des avancées des recherches faites sur les sols.

Un programme dense sur quatre jours, qui s’est achevé en beauté par une journée sur terrain en deux temps. Le matin, la visite de la plateforme CA-SYS de l’INRAE permettant de découvrir une grande diversité de systèmes agroécologiques et les travaux de l’INRAE. Et enfin l’après-midi, un temps fort a été dédié aux Climats du vignoble de Bourgogne autour du vignoble du Château de Marsannay.


Programme des Journées d’Étude des Sols 2023

Sol, terrain et innovation

Le domaine expérimental d’Époisses de l’INRAE BFC a fait la part belle à la pédologie, au machinisme et aux innovations. Les équipes de l’INRAE ont présenté le matériel de travail du sol utilisé sur la ferme agroécologie, animé une présentation de fosse pédologique ainsi qu’un atelier « entreprises innovantes ». Plusieurs adhérents du réseau AgrOnov étaient venus présenter leurs innovations pour les sols :

De très beaux échanges ont eu lieu autour de ces nouvelles solutions pour la transition agroécologique.

L’agronomie de pointe pour la gestion des sols

Tout au long de la semaine, des projets ont été la source de discussions quant à la gestion et l’amélioration des sols. Parmi les sujets, l’utilisation des haies pour améliorer la qualité des sols.

Sol et haies : un combo gagnant

Depuis plusieurs années, les agriculteurs sont encouragés à replanter des haies. Celles-ci ont été majoritairement retirées à l’issue du remembrement pour faciliter l’exploitation des terres. Aujourd’hui, des aides financières existent pour aider les agriculteurs à les réimplanter.

En effet, un paysage agricole bocager (segmenté par des haies) constitue un refuge pour la faune sauvage et favorise la biodiversité. Mais les haies sont également un rempart contre l’érosion hydrique.
Abdeljalil BOUTARFA, de l’Université de Liège, a présenté son étude sur les barrières végétales et la quantification de leur efficacité sur l’érosion hydrique des sols. La conclusion permet de mettre en évidence que les haies favorisent l’infiltration de l’eau tout en limitant l’érosion du sol. L’étude se basait sur les saules et sur le miscanthus.

Travail du sol, biodiversité et viticulture

Autre dimension de la qualité des sols : leur biodiversité en micro-organismes !
Terra Mea a révélé les conclusions de son étude sur les interangs enherbés en viticulture.
Le laboratoire a comparé la présence de micro-organismes dans les interangs sur des parcelles avec et sans enherbement. En conclusion de l’étude : il y a bien plus de micro-organismes dans les interangs enherbés que dans ceux qui sont travaillés. Ce résultat a été appuyé par les visites du Domaine Bruno CLAIR lors de la journée terrain. Ce même domaine et celui de Sylvain PATAILLE ont approuvé l’efficacité des couverts végétaux sur la qualité du sol. Cela étant, le risque de concurrence pour les ressources du sol (eau, nutriment) entre la vigne et le couvert végétal existe réellement. Ainsi, il est donc essentiel de trouver les variétés de couverts adéquates pour minimiser la concurrence avec la vigne.

Sol et Grandes Cultures

Elisol a réalisé une étude sur l’impact des digestats sur les nématodes présents dans le sol des parcelles de grandes cultures. Leur conclusion est que les digestats favorisent les nématodes bactérivores tandis que le fumier favorise les nématodes bactérivores et fongivores.

Ainsi, différentes mesures peuvent être mises en place, ou couplées, pour optimiser la qualité des sols cultivés. Si les solutions agronomiques sont nombreuses, adaptables à chaque exploitation, et font l’objet d’étude par la communauté scientifique et technique, la durabilité des sols ne peut être de l’unique engagement individuel des producteurs. Indissociable de la production alimentaire, la qualité des sols doit être une affaire de filières, et de territoires.

Dijon métropole s’implique pour ses sols

A travers son projet  « Dijon, alimentation durable 2023 – ProDij », Dijon Métropole s’engage pour impulser la transition alimentaire par une approche systémique où le sol est au cœur des réflexions. Ce projet d’envergure vise également à diminuer l’empreinte carbone de la production agricole,  avec une neutralité à horizon 2050 ; un réel engagement des politiques publiques pour la durabilité des territoires. Le PLUi (Plan local d’urbanisme intercommunal) devra prendre en compte la gestion des sols pour préserver les terres agricoles de l’artificialisation. Cette volonté s’appuie sur la réglementation ZAN (Zéro artificialisation nette). Dijon Métropole souhaite aller encore plus loin pour la protection de ses sols grâce à…la lutte contre le gaspillage alimentaire. Produire moins, mais de façon plus durable et dans le respect des sols grâce à une double stratégie :  diminuer les intrants de synthèse et une renforcer l’implantation de cultures de légumineuses. Les acteurs du territoire sont d’ailleurs impliqués dans ce projet, avec notamment Dijon Céréales positionné sur le volet de l’implantation des légumineuses.

En savoir plus : https://www.metropole-dijon.fr/Grands-projets/Transition-alimentaire-ProDij

Les labels : la clé de sol ?

La Région Bourgogne Franche-Comté compte plus de 180 Signes d’identifications de la qualité et de l’origine (appelés après SIQO). Si la notion de SIQO ne vous parle pas, vous les reconnaitrez par leurs petits noms qui peuplent l’agroalimentaire :  AOP, IGP, Label Rouge, etc. Ces signes de qualité sont le gage d’une façon de produire et suivent des cahiers des charges spécifiques, plus ou moins stricts pour le producteur. Mais ces labels prennent-ils en compte la conduite et la qualité des sols ?

Constance DE BATS, doctorante à l’Université Lyon 3, a présenté les résultats de sa thèse sur la notion de protection des sols au sein des labels agricoles, qu’ils soient publics ou privés. Les conclusions diffèrent selon les labels.

Le terroir (situation pédoclimatique ainsi que l’aspect humain de ses pratiques agricoles) est un élément prépondérant dans les cahiers des charges des SIQO.

Cependant, les différents labels ne prennent que peu en compte la notion de qualité des sols ou de leur protection. C’est le cas des AOP, des IGP et des Labels Rouges. C’est le label AB qui se positionne le plus clairement en explicitant des attentes en matière de préservation de la fertilité et des fonctionnalités des sols.

Certains labels privés font la part belle à la qualité des sols, avec des notions explicites de « protection », de « régénération » et de « conservation » des sols. L’adéquation à ces attentes est mesurée à travers le suivi du travail du sol, la couverture des sols ou la limitation ou interdiction de substances de synthèse. Des labels indépendants qui se multiplient et qui témoignent d’une envie de valoriser le travail des agriculteurs, mais qui peuvent manquer de transparence pour le consommateur. Certains labels refusent d’ailleurs de partager leur cahier des charges.

Le sol : un oublié de la législation ?

Lors de la journée « Sol et Biosolutions : au service de la transition agricole » qui a eu lieu le 17 novembre 2022, AgrOnov avait évoqué la consultation publique qui avait eu lieu sur une potentielle réglementation sur la santé des sols au niveau de la Commission Européenne. De manière générale, la conclusion avait été de dire que le sol n’était pas ou très peu protégé dans les réglementations européennes et françaises. Qu’en est-il réellement ?

               Au niveau international, le sol est un élément constitutif de plusieurs programmes. Mais aucun n’est dédié au sol à proprement parler. A noter que Le Global Soil Parternship fait mention de la gestion des sols et de leurs santés dans les objectifs globaux contre la désertification.

               Au niveau européen, la stratégie « Soil strategy for 20230 » a pour objectif ambitieux de ramener des sols européens en bonne santé d’ici 2050. Cet objectif est notamment partagé par le projet de réglementation sur la santé des sols présenté en juillet 2023 par la Commission européenne. Ce projet a pour ambition de traiter de la santé des sols, de leur surveillance, de leur gestion durable notamment par les pratiques et par l’identification des sites contaminés qui doivent être restaurés. Déposé récemment à l’étude, ce projet soulève d’ores et déjà de vives critiques de part de la Cour des Comptes européenne, avec la publication d’un rapport jugeant « les normes peu ambitieuses et un ciblage limité ».

               En France, la réglementation sur le sol est presque inexistante. Le sol n’est qu’évoqué dans certains documents législatifs comme la stratégie Bas-carbone, la loi Climat et Résilience. Il faut noter que la réglementation la plus impactante pour le sol et qui le prend le plus en compte est la loi ZAN (zéro artificialisation nette). Cependant, cette loi est sujette à polémique et est en cours de modification.

Pour aller plus loin

AgrOnov organise le 16 novembre 2023 une journée « Sol et biosolutions » dédié à l’échange entre les professionnels du domaine : Chercheurs, enseignants, entreprises innovantes, et acteurs du terrain.

Programme et inscription

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